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Société

Entourage pour toutes : une collecte pas comme les autres

A la Maison des Canaux, de 14h à 18h, des centaines de riverains ont apportés des produits d’hygiène à la collecte organisée par l’association Entourage. Pour la journée des droits des femmes, l’association s’est mobilisée pour venir en aide aux femmes les plus précaires.

14h, à la sortie du métro Jaurès. Des sacs remplis de brosses à dents, de sous-vêtements, de serviettes hygiéniques se pressent sous la grisaille parisienne pour atteindre le lieu de la collecte. Au 6 quai de Seine, dans le XIXe arrondissement de Paris, La Maison des Canaux ouvre ses portes en cette journée internationale du droit des femmes. L’association Entourage y organise une collecte de produits de première nécessité pour les femmes les plus démunies. Crée en 2016, l’association s’engage pour lutter contre l’isolement des sans-abris. Dimanche 8 mars, elle se mobilise pour les femmes en précarité.

En 2019, Entourage crée son application mobile pour mettre en lien les sans-abris et les riverains, en exploitant les données de localisation. L'idée est venue après la parution d'une étude de solinum. Selon cette dernière, 71% des sans-abris ont un smartphone. 
L'application compte aujourd'hui plus de 96000 utilisateur.trices. Les riverains peuvent répondre aux demandes que font les sans-abris sur l'application. Des événements sportifs, petits-déjeuners et temps de parole peuvent être organisés à travers l'application.
Capture d’écran de l’application
L’application Entourage. © Margot Michel

 

 

 

Cette collecte de vêtements, sous-vêtements et produits d’hygiène a été organisée, avec la mannequin marseilleise Léna Simonne. Avec plus de 320 000 abonnés sur Instagram, la mannequin, visage de la marque Sephora, s’engage pour les personnes les plus précaires. En 2019, elle avait participé à des collectes de vêtements avec Entourage. Cette fois elle co-organise. Elle ajoute sa touche personnelle en installant des stands de maquillages et de manucures aux Canaux toute l’après-midi. Marlone, une bénévole qui a rejoint Entourage en mai dernier explique : « Quand on organise des événements, on fait tout pour faire sourire les gens. Une fois c’est karaoké, un autre pétanque, aujourd’hui le petit plus c’est les stands makeup. »

« Tout droit il y a l’espace collecte »

La file d’attente pour les dons aux Canaux. © Margot Michel

Aux Canaux, lieu qui se définit lui-même comme un centre d’échange, tout était fait pour accueillir au mieux les visiteurs. A l’entrée, un pôle d’accueil d’Entourage : « Tout droit il y a la collecte, à droite les associations et à gauche l’espace goûter !  » C’est à peine si l’on voit l’espace collecte tant les riverains sont nombreux à venir donner. Au bout de la longue file d’attente, le comptoir. Trois bénévoles s’affairent à récupérer les articles que les gens leurs donnent. Sur la page Facebook de l’événement, l’association avait conseillé d’apporter des produits de première nécessité comme des protections menstruelles ou des sous-vêtements.

Dans tous les coins de la pièce, les bénévoles s’affairent, le sourire aux lèvres et déterminés à ce que tout le monde ici passe un bon moment. Les uns s’occupent à monter une sono pour accueillir Le Duo Paradoxe qui joue en milieu d’après-midi. D’autres font des allers retours entre le comptoir et la réserve où les dons sont stockés. A 15h, roulement entre les bénévoles qui reçoivent les dons et ceux qui portent les cartons pleins. « On a déjà reçu tout ça?! » s’enthousiasme Thibault à l’entrée de la réserve, des cartons plein les bras.

Les rencontres au cœur de la collecte

A deux pas du comptoir de la collecte, des tables pour jouer à des jeux de société. Mikado, Uno, cartes… Les jeux s’enchaînent au fil de l’après-midi. Ces activités donnent la possibilité aux riverains de passer du temps avec les femmes précaires venues pour les produits de première nécessité dont elles ont besoin. Ces femmes sont des ans-abris ou vivent en grande précarité, même si elles ont un logement. Estelle (pseudo), mère célibataire, est venue avec son fils Sami (pseudo) cette après-midi. « On n’a pas de jeux de société à la maison alors c’est bien de venir ici« , explique Sami entre deux parties de Uno.

Dans un coin de la salle se trouve l’espace goûter. Les riverains qui viennent déposer leurs dons apportent aussi boissons ou gâteaux. Mathilde, étudiante parisienne, est venue avec un marbré et une boîte de bonbons. « C’est toujours plus sympa d’apprendre à connaître les gens autour d’un verre », explique-t-elle. Mathilde a décidé de venir à cette collecte pour donner ce qu’elle peut : « Je suis étudiante. Je n’ai pas les moyens de faire des gros dons mais j’ai du temps. Je suis venue aujourd’hui pour découvrir l’association, et pourquoi pas m’y investir?  »

« La collecte d’aujourd’hui n’est pas qu’une collecte. On peut venir pour faire un don mais il y a aussi plein d’assos à découvrir », explique Claire Duizabo, directrice de la communication d’Entourage.Derrière l’affiche « sensibilisation », des bénévoles de différentes associations présentaient leurs actions. Agir pour la Santé des Femmes, Le Filon, et le Samu Social de Paris étaient là pour l’occasion.

L’espace sensibilisation à la collecte du 8 mars. © Margot Michel

Des associations engagées

« On cherche à révéler les talents et les richesses des femmes , explique Cécile, en disposant les flyers du Filon sur sa table. Que ce soit au niveau professionnel et social. » Elle a rejoint l’association en tant que bénévole et est maintenant salariée de l’association. Ce qui l’a séduite, c’est la convivialité qu’elle trouvait dans les événements organisés par l’association : « Quand on fait des déjeuners solidaires, toutes les bénévoles se réunissent pour cuisiner ensemble, c’est sympa ». Un esprit de convivialité partagé par Eve, du Samu Social. Son association ouvre les douches municipales aux femmes, chaque après-midi. Elle confie : « On n’est pas une très grande association. Ça nous permet de mieux connaître les femmes qui viennent. »

Ces associations se mobilisent pour apprendre à connaître ces femmes mais surtout pour les rendre autonome. Agir pour le Développement de la Santé des Femmes est formée de plus de 200 bénévoles. Parmi eux, quatre « femmes repères » – anciennes sans-abris -, comme Adama, présente pour faire découvrir son association. Par leur expérience de vie, elles connaissent les genre d’endroits dans lesquelles les femmes sans-abris vivent. « Pendant les maraudes, on trouve ces femmes, on leur distribue un kit d’hygiène de première nécessité : shampooing, crème, tampons… énumère Adama. Mais à terme, on les accompagne pour qu’elles soient autonomes. » Adama a appris le français à Amelia (pseudo), originaire du Portugal. Au bout de quelques mois, Amelia a pu être guidée vers d’autres organismes associatifs plus spécialisés pour lui créer un CV et lui trouver un hébergement. Adama conclut : « On veut dans un premier temps leur faciliter l’accès à la santé, mais on veut surtout les laisser voler de leurs propres ailes ensuite. »

 

 

 

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