Le 28 février, l’Académie des César décernait à Roman Polanski, accusé de viol, le César du meilleur réalisateur pour son film J’accuse. Pour protester contre cette récompense, le collectif Nous Toutes organisait, dimanche 1er mars, une action « collages et pochoirs » dans tout Paris.
21h40, Place de Clichy, des seaux, des pinceaux, des sacs de colle et des bouteilles d’eau jonchent le sol de l’arrêt de bus de la ligne 21. Une trentaine de militantes de Nous Toutes sont venues au rendez-vous pour récupérer leur nécéssaire de collage. Olympe, Lou, Justine et Laurine, toutes étudiantes, écoutent avec attention les dernières consignes de sécurité énoncées par une organisatrice.
Le 28 février, Roman Polanski était consacré meilleur réalisateur lors des César, malgré les accusations de viols qui lui sont attribuées.
Ces 4 jeunes femmes sont venues exprimer leur colère pour la première fois avec le collectif Nous Toutes et les apprenties colleuses ne sont pas venues les mains vides. Fièrement, elles sortent des pochoirs faits-main et des bombes de peinture neuves de leurs sacs. Olympe récupère le matériel de collage puis le groupe s’empresse de partir.
Le premier pochoir, « Violanski » (slogan inventé pour l’occasion), est tagué devant le lycée Jules Ferry. Une idée de Lou, 18 ans, : « C’est important de faire ça devant un établissement scolaire. » Très vite, plusieurs passants curieux s’arrêtent, observent la scène, intrigués, avant de continuer leur route.

Non loin de là, rue Pierre Harret, les quatre étudiantes repèrent un ancien collage de Nous Toutes, volontairement dégradé. « C’est un bon signe, confie Laurine, si quelqu’un a tenté de l’arracher ça veut dire que ça dérange, c’est bien. » Elle s’empresse de préparer la colle pour recouvrir ces vestiges d’une nouvelle affiche : « Distinguer Polanski, c’est cracher au visage de toutes les victimes ». Citation extraite d’une interview d’Adèle Haenel, parue dans le New York Times fin février. Cette actrice française dénonce le harcèlement sexuel et les attouchements dont elle a été victime de la part du réalisateur Christophe Ruggia à l’âge de 12 ans.

Pendant que certaines collent des affiches, d’autres s’occupent des pochoirs. « Il faut les mettre au milieu du trottoir, comme ça les gens vont bien le lire », conseille Lou en replaçant bien le pochoir au sol. Un rapide coup de bombe passé et voici le trottoir marqué d’un « Ecœurées » (en référence à la story Instragram de Florence Foresti, présentatrice des César, postée à la suite de la récompense de Roman Polanski).
« Oh ! Regardez un beau mur blanc », s’exclame Lou avant d’y coller une affiche « César de la honte ». « Pourquoi vous faites ça ? Ça veut dire quoi ce message ? », interroge un jeune homme. « Vous n’avez pas entendu parler de Polanski et des César ? », lui demande Justine. L’homme hoche la tête. Olympe mentionne alors les douze nominations de Roman Polanski, ainsi que sa victoire en tant que meilleur réalisateur. « douze, comme le nombre de ses victimes. Et quand on parle de victimes, on parle d’enfants de 13 ans qu’il aurait droguées et violées », explique t-elle. Désormais plus averti, le passant reprend : « Je comprends mieux, bon courage alors », avant de s’éclipser.

Leur dernière affiche, Olympe, Lou, Justine et Laurine souhaitent la coller sur la façade d’un cinéma d’art et essai dans le quartier Blanche. « Oh bah tiens, on a bien fait de venir ! » s’exclame Lou en découvrant que le cinéma en question diffuse toujours J’accuse. Très vite, elle saisit son pinceau et recouvre l’affiche du film avec les numéros d’aide aux victimes de violences sexuelles. « Là c’est mieux », plaisante t-elle.
Vers 23 heures, les quatre filles sont contraintes de mettre fin à leur action, par manque d’affiches. Elles reviennent alors sur leur soirée et toutes se promettent de retourner à une soirée du collectif. Lou ironise : « On aurait dû marquer Polanski sur les passages piétons pour qu’on lui marche dessus ».