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L‘éphémère maison des peuples à la Flèche d‘Or

A l’occasion du premier anniversaire des Gilets jaunes, le 16 novembre, une vingtaine de collectifs ont occupé la Flèche d’or : un ancien lieu culturel fermé depuis deux ans, à deux pas de la station de métro Alexandre Dumas. Renommée «  Maison des Peuples », la Flèche d’or est devenue le temps d’un weekend le théâtre d’une convergence des luttes festive et conviviale… avant d’être évacué manu militari par les forces de l’ordre. 

« On avait gardé la localisation secrète, mais cette maison des Peuples, on la prépare depuis un moment, y avait des gens qui y dormaient depuis le début de la semaine », annonce Victor, un jeune militant qui exprime son dégoût suite à l’expulsion du bâtiment. Samedi en fin de journée, le lieu de débat était ouvert. A l’initiative du projet, une vingtaine de collectifs : gilets jaunes, gilets noirs, militants écologistes d’Extinction Rebellion, collectifs LGBTQIA…

« C’était la première fois que je voyais autant de cohésion autour d’un lieu en un temps si court, samedi soir il y avait une fanfare, des gens qui cuisinaient… on voulait un vrai refuge, loin de la violence des rues », explique Victor. « On a jamais réussi à se mettre d’accord comme ça avant. Mais là avec l’horizon du 5 décembre, il y a de vrais points de convergences. Avoir un lieu pour se retrouver, en discuter, c’est central. Mais ça aura été bref… ». 

Un voile d’amertume dans la voix, Victor fait référence à l’expulsion qui vient d’avoir lieu. A peine 24h après son ouverture au public, la maison des peuples fait circuler un appel au soutien sur twitter. Les forces de l’ordre bloquent l’accès à la rue de Bagnolet, dans laquelle se situe la Flèche d’Or, éphémère maison des peuples.

Une fois sur place, l’atmosphère est tendue. Une centaine d’occupants et de riverains sont groupés au croisement de la rue de Bagnolet, sans pouvoir s’approcher de l’endroit ni voir ce qu’il s’y passe. Parmi eux, de jeunes enfants, des personnes âgées, des habitants du quartier qui se rendent à la boulangerie ou rejoignent leur logement. Quelques militants tentent une chaîne humaine afin de bloquer la circulation des véhicules, sans succès.

Car de police et gaz lacrymogènes

C’est à ce moment-là que les premiers gaz lacrymogènes sont envoyés sur les individus rassemblés. La rue est envahie d’une fumée aveuglante qui rend la respiration difficile, chacun s’éloigne pour se protéger, dans la confusion et l’incompréhension. Pendant ce temps, les policiers s’écartent pour laisser passer un bus dans la rue de Bagnolet, fermée au public : c’est dans ce dernier que seront conduits les occupants de la maison des peuples  au commissariat du 18eme arrondissement. Ils en seront libérés une demie heure plus tard. La maison des peuples, elle, sera surveillée par des agents de sécurité jusqu’à la fin de la soirée.

Une expulsion difficilement justifiable

Egalement présente sur les lieux, Clara, étudiante en droit, souligne l’irrégularité de cette expulsion virulente : « normalement, quand un bâtiment est occupé plus de 48 heures, le propriétaire doit faire intervenir un huissier pour constater l’occupation, et ensuite convoquer les squateurs devant la justice. Je ne comprends pas à quoi sert le droit si la police s’en affranchit dès que ça lui chante. »

Cependant, elle voit avec enthousiasme l’initiative, qui lui donne espoir pour la suite : « Une telle convergence à Paris, c’est du jamais vu. Je vois un vrai rapprochement entre Gilets jaunes et écolos, on est sortis du « chacun son combat ». Ça a pas marché pour cette fois-ci, mais je crois qu’une dynamique est lancée ». C’est aussi cet espoir, que l’on peut lire sur le visage des badauds et militants encore attroupés rue Bagnolet après le départ de la police, devant les grilles bien closes de l’éphémère maison des Peuples.

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