Situé dans le 8ème arrondissement non loin de la station Courcelles, cet édifice orthodoxe datant du XIXème est un lieu de culte mais surtout de vie, moteur de la communauté russophone de la capitale.

Difficile de se frayer un chemin parmi la douzaine d’enfants qui jouent devant la cathédrale. Les fidèles se sont déplacés en nombre ce dimanche matin dans la Cathédrale Saint Alexandre Nevsky, non loin de la Station Courcelles dans le 8ème arrondissement de Paris. Le 26 janvier dernier, la Cathédrale Saint Alexandre Nevsky était le théâtre du dernier adieu au compositeur Michel Legrand. A la fin de la messe dominicale, un petit groupe se distingue pour célébrer en petit en petit comité les obsèques de Dimitar*, bien moins célèbre que le compositeur des «Parapluies de Cherbourg». L’homme n’en était pas moins connu par la communauté russe de Paris, et était d’ailleurs le mari de l’une des personnalités actives de la paroisse. Mais difficile de pouvoir s’entretenir avec elle, car personne ne souhaite nous répondre dans ce moment difficile. Signe que les orthodoxes cultivent la discrétion sur la façon de mener leur culte. C’était la deuxième cérémonie pour Dimitar, neuf jours après son décès. Selon les rites orthodoxes, on peut rendre hommage au défunt le troisième jour (jour des obsèques), le neuvième et le quarantième, puis le jour anniversaire du décès par un office nommé la «Pannychide». Les chrétiens de Russie voient la mort comme une passerelle menant vers une deuxième naissance et l’attribution d’une vie nouvelle.
Passage obligé pour les russophones

Plus qu’un lieu de culte, cet édifice orthodoxe fondé en 1817 est un lieu de vie apprécié par la communauté russe de Paris. On y vient en famille, avec des amis. Toutes les générations sont présentes, des tout-petits aux arrière-grands-parents. Les fidèles viennent de loin, peu d’entre eux ont le privilège de vivre à Paris. Certains ont fait plus d’une heure de RER pour venir. Comme dans le catholicisme, la messe du dimanche est un moment fort de la vie orthodoxe. On s’y retrouve pour festoyer, et s’entraider. Chacun apporte son aide pour la paroisse, tout le monde est bienvenu et l’on y prodigue conseils et soutien dans les moments difficiles.
Assise sur un banc au milieu de la cathédrale, Irina Oboukhova est une fidèle qui aide régulièrement la paroisse. Elle pourrait difficilement se passer des événements organisés dans la Cathédrale: «C’est un point de repères, les nouveaux arrivants en France peuvent venir demander de l’aide, poser des questions sur les modalités de régularisation et recevoir des conseils pour s’intégrer sur le territoire français», confie la quinquagénaire, suivi d’un silence monastique où le patriarche énumère les faits de vie de Dimitar.
Lieu majeur du culte orthodoxe

12 h 30, les fidèles sortent l’un après l’autre de Saint Alexandre Nevsky après avoir communié une dernière fois. Alexandre Jevakhoff, responsable laïque de la paroisse, se présente comme le responsable de l’association culture orthodoxe de Paris. Il connaît sur le bout des doigts cet endroit, jusqu’aux moulures qui jonchent le plafond. Si l’on regarde de loin, cette cathédrale ressemble comme deux gouttes d’eaux à une église catholique. Une comparaison qui fait sourire Alexandre, qui tient à nous expliquer les différences: «Le prêtre officie dos aux fidèles, il n’y a pas de prêtre unique mais plusieurs patriarches et le plus important c’est l’absence de laïcité. Il y a une véritable collusion entre la religion et la politique, ce qui fait de la religion un pilier central de la société qui montre la voie à suivre». Ce qui n’est pas le cas du catholicisme en France, une société basée sur la laïcité. Autre différence majeure: la cathédrale bénéficie de quelques salariés, chargés d’entretenir la viabilité pour la paroisse. Elle est vitale pour Alexandre, Irina, et de nombreux russophones de Paris.
Paul Ruyer et Irvin Blonz
*Le prénom a été modifié